Mark Ivanir
La liste de Schindler (Steven Spielberg - 1993)
dimanche 18 janvier 2009 Vu dans : Télévision
On a peut-être tellement déjà
dit, montré, filmé sur la Shoah, que Spielberg
l’évoque sous un aspect original - mais de
manière tout autant convainquante - en racontant
l’épopée de quelques juifs sauvés de l’holocauste
par un industriel allemand. Cet industriel -
Schindler, c’est lui - est au départ un
personnage cynique qui espère bien faire fortune
aux dépends des juifs polonais et avec la
complicité des autorités allemandes. Peu à peu,
il va prendre conscience de ce que subissent ces
pauvres gens et lorsque la solution finale
apparaîtra comme la seule option, il fera tout ce
qu’il pourra, engageant sa fortune si mal
acquise, pour en sauver 1000. C’est effectivement
une goutte dans l’océan de la Shoah, mais comme
le dit un rabbin à la fin du film : une vie de
sauvée, c’est le monde qu’on sauve. Schindler y
gagnera le titre de « Juste ». Le film
est absolument remarquable. Il a été filmé en
noir et blanc pour renforcer l’effet dramatique
et permet des effets d’une force incroyable :
dans un scène, une fillette cherche à échapper au
massacre annoncé du ghetto de Cracovie et son
manteau est colorisé; cela permet de la suivre en
arrière plan en quête d’un abri improbable; on la
retrouvera malheureusement parmi les victimes
enterrées dans un charnier puis exhumées pour
être brûlées. Le film est truffé de scènes choc
et sans concession. Comme ce commandant du camp
de travail qui tire au hasard sur les bagnards
simplement pour passer le temps. A un moment, on
croit qu’il va comprendre ce que lui dit
Schindler sur le vrai pouvoir, celui de se
montrer clément, mais il se persuadera rapidement
qu’il n’en tire aucun avantage; au contraire,
cela heurte sa conscience. Il finira pendu sans
aucun remord. Une autre scène d’une force
extraordinaire est celle de ces femmes juives qui
se retrouvent par erreur à Auschwitz. Elles
savent ce qui attend d’ordinaire les juifs qui y
sont amenés et lorsqu’elles doivent passer sous
la douche, une vraie, la certitude que leur
dernière heure est arrivée rend la scène aussi
édifiante que si le réalisateur avait montré la
réalité sordide. Et que dire de cette rue pavée
des dalles prises dans le cimetière juif de
Cracovie. Le film trouve dans ces moments un sens
auquel seul un chef d’oeuvre peut prétendre.
|