Caroline Goodall

La liste de Schindler (Steven Spielberg - 1993)

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On a peut-être tellement déjà dit, montré, filmé sur la Shoah, que Spielberg l’évoque sous un aspect original - mais de manière tout autant convainquante - en racontant l’épopée de quelques juifs sauvés de l’holocauste par un industriel allemand. Cet industriel - Schindler, c’est lui - est au départ un personnage cynique qui espère bien faire fortune aux dépends des juifs polonais et avec la complicité des autorités allemandes. Peu à peu, il va prendre conscience de ce que subissent ces pauvres gens et lorsque la solution finale apparaîtra comme la seule option, il fera tout ce qu’il pourra, engageant sa fortune si mal acquise, pour en sauver 1000. C’est effectivement une goutte dans l’océan de la Shoah, mais comme le dit un rabbin à la fin du film : une vie de sauvée, c’est le monde qu’on sauve. Schindler y gagnera le titre de « Juste ». Le film est absolument remarquable. Il a été filmé en noir et blanc pour renforcer l’effet dramatique et permet des effets d’une force incroyable : dans un scène, une fillette cherche à échapper au massacre annoncé du ghetto de Cracovie et son manteau est colorisé; cela permet de la suivre en arrière plan en quête d’un abri improbable; on la retrouvera malheureusement parmi les victimes enterrées dans un charnier puis exhumées pour être brûlées. Le film est truffé de scènes choc et sans concession. Comme ce commandant du camp de travail qui tire au hasard sur les bagnards simplement pour passer le temps. A un moment, on croit qu’il va comprendre ce que lui dit Schindler sur le vrai pouvoir, celui de se montrer clément, mais il se persuadera rapidement qu’il n’en tire aucun avantage; au contraire, cela heurte sa conscience. Il finira pendu sans aucun remord. Une autre scène d’une force extraordinaire est celle de ces femmes juives qui se retrouvent par erreur à Auschwitz. Elles savent ce qui attend d’ordinaire les juifs qui y sont amenés et lorsqu’elles doivent passer sous la douche, une vraie, la certitude que leur dernière heure est arrivée rend la scène aussi édifiante que si le réalisateur avait montré la réalité sordide. Et que dire de cette rue pavée des dalles prises dans le cimetière juif de Cracovie. Le film trouve dans ces moments un sens auquel seul un chef d’oeuvre peut prétendre.